Planet Arrakis

Jeux de rôle, jeux de plateau, prenez ce qui vous plait…

Archive pour D&D

Mon histoire avec le Jeu de Rôles, par Ingela A.

Une femme, enfin ! La parole à Ingela A., professeure d’anglais, 51 ans …

La Tour d’Arnac, le scénario de D&D
joué par Ingela et Jean-Pierre,
est une improvisation tirée de la BD
de William Vance : Ramiro,
que Moud Ubid lisait dans ses jeunes années,
dans le Femmes d’Aujourd’hui
de sa grand-mère… 

1. Comment avez-vous découvert le jeu de rôle ? Qui vous a initié ? Vous aviez quel âge ? Quel était le nom de votre premier personnage et sa classe de personnage ? À quoi avez-vous joué ? Aviez-vous les règles ? Où vous les étiez-vous procurées ?
Triste à devoir avouer – pour une féministe invétérée – mais ça s’est fait via mon petit ami, j’avais tout juste 20 ans. Pas moyen de me rappeler de mon premier perso, mais sans doute une voleuse puisqu’on jouait à D&D, et que je n’avais pas encore compris que les personnages me correspondent mieux s’ils ne sont pas trop intelligents.

Les autres joueurs et le DM ont bien essayé de m’expliquer les règles, mais franchement j’ai encore aujourd’hui du mal à me rappeler quel dé utiliser dans quelle situation. (Et oui, il y a certainement une explication pour mes difficultés à jouer des persos qui réfléchissent…)

2. Le jeu régulier : quand avez-vous commencé à jouer régulièrement ? Immédiatement après cette partie, ou plus tard ? Pourquoi ? Qui était votre maître du jeu ? À quoi jouiez-vous ? comment s’appelait cette campagne ? quel était le nom de votre personnage et sa classe de personnage ?
La première partie m’a bien plu, donc pour autant que je m’en souvienne, j’ai continué tout de suite à jouer régulièrement avec le même groupe, au même type de jeu (D&D). Le DM était toi, Paul Moud Ubid ! Je n’essaierai même pas de me rappeler des noms des campagnes ou de personnages! Il y a eu surtout des voleurs et des barbares, mais comme c’est plus rigolo de les jouer un peu casse-cou, ils ont tendance à mourir régulièrement.

Les premières aventures,
dites en Terre du Milieu (circa 1993)
dont les mémoires ont été rédigées
par Ingela A. (collection de l’auteur)

3. Maître de jeu : quand êtes-vous devenu maître de jeu ? Pourquoi ? (ou pourquoi pas ?) Et de quels matériels disposiez-vous à l’époque ? Livre de jeux ? figurines ? autres ? comment s’appelait cette campagne ? Qui l’avait écrit, vous, ou un scénario du commerce ? Combien de temps a-t-elle duré ?
Quand on est prof dans la vie, le rôle du DM n’a que très peu d’attrait, au moins dans mon cas. Les jeux de rôles, pour moi, sont un peu comme le sport ; l’idée est de débrancher temporairement toute activité cérébrale.

4. Arrêt/Reprise : quand avez-vous arrêté ? Quand avez-vous repris ? Et pourquoi ?
On a peut-être continué à jouer après la naissance de ma fille aînée, mais quand on a eu des jumeaux, il a fallu faire des choix ! (Et le sommeil prime sur TOUT. Toujours.)

J’ai repris quand les enfants ont eu une dizaine d’années, il me semble, mais à coups de soirées isolées, pendant assez longtemps.

5. Personnage favori : Quel est le nom de votre personnage favori et que fait-il dans la vie ?
Une pensée pour Ferro, paysan devenu “guerrier” un peu par accident (par dévouement religieux aussi soudain que fervent, me semble-t-il ?) et au QI légèrement inférieur à celui de son cheval. (Note du DM : 4 en INT pour le cheval (le maximum) et 3 pour le PJ (le minimum))…

Toute la vérité sur Ferro : les preuves accablantes… 

6. Personnage décédé : Avez-vous perdu un personnage ? Quel était le nom de ce personnage et que faisait-il dans la vie ? comment est-il décédé ?
J’en ai perdu plein. (Je ne voudrais pas avoir l’air de mettre ça sur le dos du DM, mais bon… ) Ferro est celui que je regrette le plus.

7. Avant de jouer au jeu de rôle, lisiez-vous de la science-fiction ? Du fantastique ? Ou avez-vous lu ces livres après ? Jouiez-vous aux jeux de plateau ? aux wargames ? A Diplomatie ?
J’ai toujours lu un peu de tout, donc j’avais déjà lu Lord of the Rings, Dune et la trilogie d’Asimov, par exemple. J’avais adoré Shardik de Richard Adams, que j’ai relu avec grand plaisir après que George RR Martin l’ait mentionné dans un interview il y a quelque temps.

Les jeux de plateau, Diplomatie et autres ne permettent pas de débranchement cérébral, donc j’ai essayé, mais pas trop aimé.

Shardik, de Richard George Adams,
plus connu en France pour La Colline aux Lapins
(Les Garennes de Watership Down)

8. Enfin, pour finir, quel est votre plus beau souvenir de jeu de rôle ?
Peut-être le tout premier, autour de la table dans le séjour normand de mes futurs beaux-parents. Ou celui où ma fille cadette et sa copine ont découvert et apprécié le jeu de rôle…

Empire of Imagination

 

Empire of Imagination

On poursuit la recherche de nos racines rôlistiques en lisant cet été, au pays de Nicolas Machiavel (qui, comme chacun sait n’est pas en Tilée car en mission auprès du Graf de Middenheim), la biographie de Gary Gygax : Empire of Imagination, par Michael Witwer.

Bien sûr, c’est dans la catégorie très américaine des biographies « autorisées » et donc hagiographiques mais ça n’en demeure pas moins intéressant sur les coulisses de la genèse du jeu de rôle. Non, Gary Gygax, n’a pas tout inventé et on commence à le savoir*, mais sans lui, rien ne serait arrivé. Comme disait Stanley Kubrick, il ne suffit pas d’avoir une idée, il faut surtout la réaliser**.

C’est ce que fera Gary Gygax sur les bases des Braunstein napoléoniens de David A. Wisely, et de Blackmoor, ce Braunstein médiéval fantastique qui se poursuit de partie en partie avec les mêmes personnages. Il ne les a pas inventés, ces concepts, mais c’est lui qui mettra son talent d’écriture et de game designer, mais aussi ses économies, sa santé à écrire et à formaliser Donjons&Dragons.

Au passage on n’apprendra aussi que le grand homme était Témoin de Jéhovah et Libertarien, (en gros un peu plus libéral, économiquement, que Donal Trump), ce qui n’étonnera pas ceux qui s’intéressent à philosopher un peu autour du jeu de rôle. C’est à dire qu’il n’est pas neutre que D&D pousse le joueur à progresser (les niveaux) ; qu’en accumulant de l’or, on progresse plus vite, etc.

Autre anecdote peu connue : quand D&D s’est mis à gagner des mille et des cents PO, Gygax a eu son petit passage Hollywoodien : prostitués, marijuana et cocaïne (habituellement appelés Cure Light Wounds). Enfin le livre donne un éclairage intéressant sur l’aspect capitalistique de l’affaire. Pour se développer, il faut des associés, et, ami ou pas, ça finit mal. Ça finira en procès contre l’ami Arneson (Arneson gagnera) et contre les frères Blume (là Gygax perdra carrément son bébé, TSR, la maison d’édition)…

On peut désormais s’attaquer à Playing at the World, de Jon Peterson, la Bible, parait-il…

 

* « Of Dice and Men: The Story of Dungeons & Dragons and The People Who Play It » de David M Ewalt ou chez nous, « L’Histoire de Dungeons & Dragons, des origines à la 5ème édition », de Fabrice Sarelli

** Kubrick : « Hélas, les idées ne font pas les bons films. Il faut des idées dans les bons films, mais cela demande beaucoup de créativité artistique pour incarner fortement une idée… »

 

 

L’Histoire de Dungeons & Dragons

C’est un tout petit livre (140 pages) mais un livre passionnant sur les premières années de notre hobby : les années Braunstein, Blackmoor, Chainmail. Si ces mots ne vous disent rien, c’est que vous ne connaissez pas bien la genèse du jeu de rôle.

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Fabrice Sarelli, Monsieur Hexagonal…

 

Jetez-vous donc sur cette monographie, uniquement consacrée à D&D, mais sur ses cinq éditions US. Et si Fabrice Sarelli est moins pertinent sur les dernières éditions, il est passionnant sur les débuts. Et pour cause, comme il l’autoproclame, Fabrice Sarelli – avant de fonder Hexagonal et de traduire en français JRTM, Vampire, et Shadowrun – fait partie des rôlistes de la première heure de la Rue d’Ulm*.

C’est donc la première moitié de cette Histoire de Dungeons & Dragons qui est passionnante, ou comment des wargamers, un peu par hasard, ont inventé un loisir de millions de personnes, qui va bientôt fêter ses cinquante ans. Par hasard, et même un peu contre leur volonté.

David A. Wisely, le papa du Braunstein…

Première anecdote : quand David A. Wesely décide en 1968, de lancer une première partie de son wargame 1 :1 (c’est à dire 1 figurine = 1 homme), dans un univers napoléonien et germanique fictif, situé dans la petite ville de Braunstein, la première partie est un cauchemar : 22 joueurs et des apartés interminable avec l’Arbitre pour discuter des points de règles. Mais tout le monde a passé une super soirée. Sauf David Wesely. Les parties suivantes, il réduit le nombre de participants et fixe des règles précises. Ça marche mieux, mais l’ambiance de la première partie n’est plus là. Les joueurs finissent par l’avouer : ils ont aimé ce joyeux bordel, les interactions, et cette folle liberté qui n’existe pas dans le wargame. Bientôt, Dave Arneson va participer à un de ces Braunstein, et apporter quelques changements. Il crée un cadre médiéval fantastique nommé Blackmoor, propose que la partie suivante reprenne là où l’on s’était arrêtés, et que les joueurs gardent leur personnage de partie en partie… et il va surtout inviter un ami, Gary Gygax, et utiliser les règles de combat rédigés par celui-ci, Chainmail, pour améliorer Blackmoor. Le jeu de rôle était né.

Le set originel de D&D, vous en avez sûrement un à la maison, crayonné à la cire… 

Deuxième anecdote : quand Gygax et Arneson impriment leurs premières règles de D&D, il leur faut des dés à 20 faces. En effet, celles-ci n’utilisent que des d20 et des d6. Mais le d20 est une rareté, jusqu’à ce que les fondateurs de TSR ne découvrent un set de dés éducatifs qui permet de faire découvrir aux enfants les solides de Platon : d4, d6, d8, d12, d20. Plutôt que dépuncher le tout, les fondateurs de TSR ne les introduiront dans le premier supplément Greyhawk… ils fournissent également un crayon de cire pour noircir les chiffres des dés qui sont vendus sans marquage.

 

*Intéressante vidéo ici sur TV Roliste :  https://www.youtube.com/watch?v=_to2f37ePzM

L’Histoire de Dungeons & Dragons, des origines à la 5ème édition, de Fabrice Sarelli, éditions OhMy Game
Disponible dans les bonnes boutiques, ou là : http://oh-mygame.com/fr/p/3006037-histoire-de-dungeons-dragons.html#ans

Des PNJ pour D&D en 30 secondes

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Une des problèmes de Donjons & Dragons, c’est qu’il est compliqué d’improviser un PNJ, vu la complexité des règles. Une complexité bien pratique pour élaborer nos Personnages Joueurs, intégrant parfaitement les subtilités de l’Inné et de l’Acquis – le fameux carac+compétence.

Mais voilà, nos PJ veulent soudain affronter (intellectuellement ou physiquement, peu importe) un personnage que vous avez placé là juste pour le décor, ou pour révéler un indice. Dans l’Appel de Cthulhu c’est facile : un chirurgien doit avoir de bonnes chances (60%) de se servir d’un couteau, et un bibliothécaire de très petites chances de faire de même (15%).

Traduire cela à D&D est moins intuitif, mais je n’échangerais pour rien au monde mon d20 contre des dés à pourcentage, au moins dans un univers médiéval*. J’ai donc suivi, en quelque sorte, les conseils de John « Dirty MJ » Wick qui suggère de faire des mini-fiches avec un nom, un lieu, un trait de caractère, et deux ou trois compétences clés.

conan-philosophe

20% de chance pour Conan d’être d’accord avec Derrida pour dire que les théories du signe s’inscrivent dans le courant poststructuraliste, et donc s’opposer au structuralisme saussurien…

Mais surtout, j’ai décidé de faire un pense bête « PNJ en 30 secondes » qui me permet d’ajuster immédiatement la difficulté de la rencontre. Je ne me suis intéressé qu’aux données clefs : PDV, ÇA, Jet de Sauvegarde, et Bonus à l’Attaque.

Bien sûr, c’est caricatural ; le but n’est pas de dessiner le grand méchant de votre histoire mais bien de gérer cette rencontre sans perdre de temps…

Vous retrouverez ce tableau dans ma synthèse Aide-mémoire, où j’ai mis – à mon sens – les tables les plus importantes pour D&D …

* Le d100 me semble parfait pour l’époque contemporaine, où l’on est habitué à mesurer en %. Je trouve qu’on perd du rêve si l’on dit que Jochen à 70% de toucher sa cible. Je préfère lui dire que la difficulté est de 20, voire ne rien dire du tout. C’est cette zone d’incertitude (même si le joueur peut la calculer) qui fait la magie des systèmes comme D&D, Vampire, ou le Roll& Keep.

« C’est quoi des points de vie ? »

HP
Excellente question posée par l’ami Conrad, le nautonier du Reik.

C’est quoi des points de vie, en effet ? Ça fait tellement longtemps qu’il n’en a pas perdu, l’ami Conrad, qu’il ne sait même plus ce que c’est. Peut-être un mois dans le temps du Reik, le long fleuve majestueux qui irrigue l’empire de Warhammer… peut-être un soir d’août à Middenheim, contre quelques magiciens chevauchant des Dragons du Chaos, en vue d’exterminer l’humanité. Mais des mois, voire des années pour Gilles, son joueur…

C’est ça le jeu de rôle moderne. Fini les explorations de donjons lugubres, les bugbears qui rapportent 150xp et qui peuvent faire 1d8HP de dommages avec chaque griffe. Non, le jeu de rôle moderne – en tout cas avec des quinquas – c’est commercer le long du Reik et essayer de maximiser les marges sur ce petit vin blanc acheté pas cher à Kemperbad. C’est négocier avec les nains le coût d’un viaduc : si je vous le fais à 90 000 couronnes, vous me refaites la salle de bains en même temps ? C’est acheter des robes en triple exemplaire pour sa chérie et trouver des auberges au meilleur rapport qualité/prix. C’est aller au théâtre et manger des huîtres.

Bref, plus trop besoin de points de vie.

Ça sent bon la retraite les gars !