Planet Arrakis

Jeux de rôle, jeux de plateau, prenez ce qui vous plait…

Archive pour Répliques Cultes

« Bon, au final on a buté un prisonnier, un cocher désarmé et un infirme. C’était génial. On reprend quand ? »

Comment résumer quatorze ans de Campagne Impériale ? il suffit de demander à Gilles, Palme d’Or 2021 (oui, déjà !) de la Punchline. Nautonier dans le civil, mais aussi Livreur de pizzas au fin fond d’une bétonnière ou Bootlegger irlandais, Gilles n’en est pas à sa première citation dans ce blog…

Une fois reçu le mensuel résumé de la dernière partie, il s’est ainsi écrié :

-« Bon, au final on a buté un prisonnier, un cocher désarmé et un infirme. C’était génial. On reprend quand ? »

Traduisons. On a buté un prisonnier : un soldat gobelin qui les attendait à la sortie de Khadar Khalizad ; un cocher désarmé : un autre gobelin qui conduisait un misérable chariot au milieu d’une steppe inconnue ; et un infirme : rien de moins que Karl-Heinz Warsmeier, Seigneur des Lois de Middenheim.

La fin d’une longue poursuite, entamée après la libération de la Cité du Loup Blanc des griffes de la Main Pourpre, jusqu’aux confins du Vieux Monde, en passant par le Conseil Impérial à Altdorf…

Prière à Ulric

Coincés dans les profondeurs de Khadar Khalizad, nos héros, guettant la fin de de la peste répandue par le Rat Cornu, s’en remettent à Ulric. Hadden improvise alors cette longue prière :

 

A toi Ulric, Seigneur des Loups, Dieu de l’Hiver
Et des Forêts, Maître de Guerre et du fracas,
Je te dédie mon sang, ma bravoure au combat
Mais entend aujourd’hui mon unique prière.

Que ma lame transperce et jette sous la pierre
Adeptes du Chaos, adorateurs du Rat,
Pour défendre l’Empire et pour Katarina
Fille du Nord, aux cheveux d’or, fière héritière.

Protège la Gravin, élue parmi les rois,
Ici présente, à mes côtés, et devant Toi,
Main dans la main, cœur contre cœur,
face au danger.

Accepte en ce serment le don de tes enfants,
En ta Flamme sacrée, l’offrande de nos sangs.
Sur ma vie, par ma foi, mon souffle et mon épée!

Qui a dit que les rôlistes n’étaient pas poètes ?

Le Trône de Fer, la grande métaphore finale

Je me permets de recopier la chronique que j’ai faite sur Cinefast car je pense qu’il y a beaucoup de fans du Trône de Fer qui traine sur Planet Arrakis… Je pense aussi que certains enseignements scénaristique de ce dernier épisode de notre série fétiche peuvent intéresser aussi les Rôlistes. Bonne lecture !

 

Les grandes séries ne meurent jamais. Le Trône de Fer, après avoir subi toutes les avanies possibles, le manque d’inspiration, la langueur, puis la stupide accélération, menant de fait à la destruction de la physique de son monde (distances abolies, et super héros chevauchant des dragons à grande vitesse chargés de de kérosène), le plus grand show du XXI° siècle se termine de façon éclatante.

Au bout d’une huitième saison totalement surprenante, aux rebondissements souvent maladroits ou irréalistes, Game of Thrones rattrape tout, dans un ultime épisode métaphorique et époustouflant.

Comme dirait Jonathan Franzen, des erreurs furent commises ; Comme dirait Tyrion, elles ont été réparées. En 75 minutes, la série boucle non seulement les histoires de son immense cast (sans avoir l’air de se presser), donne un cours de philosophie politique, propose une morale revigorante contredisant son propos principal, et se permet de commenter, en mode méta, la propre fascination qu’elle a engendrée. Revue de détail…

Tuer le tyran qui est en nous (3 leçons de philosophie politique)

S’il est une série politique, c’est bien celle-là. 73 épisodes sur la conquête du pouvoir, le Trône de Fer est à la série télé ce que Le Prince de Machiavel est à la politique (1).

Il appartenait aux auteurs de conclure sur la question initiale de la conquête du fameux trône, sachant qu’aucune solution ne pouvait être réellement satisfaisante. Si Daenerys gagnait, elle offrait une victoire moralement appropriée (le triomphe du tiers-monde opprimé) mais qui pouvait apparaître comme Hollywoodienne. Si au contraire Cersei sirotait tranquillement son cabernet dans le Donjon Rouge (probablement la fin la plus Game of Thrones, au passage), elle décourageait le fan qui souhaitait sa mort depuis le début. Quant à Jon Snow, le beau gosse, il n’avait pas l’air équipé pour le rôle de Grand Leader, et sa cote sombrait d’épisode en épisode…

Pourtant, c’est vers lui que se tourne le destin. Par la voix de Machiavel-Tyrion, évidemment. Daenerys a gagné, a exterminé toute la ville, et ses alliés sont plus inquiets que jamais. Jon rend visite à Tyrion, la Main démissionnaire. « La guerre n’est pas finie », lui dit-il en substance. Maintenant que Daenerys-la-Libératrice est prête à détruire la roue de l’oppression, et qu’elle a, comme tant d’autres, le sentiment d’être du bon côté, c’est une forme de jihad qui s’annonce, une dictature du Bien qui fera des millions de morts.

Première leçon : nous aussi, nous avons admiré cette jolie princesse libératrice d’esclaves. Elle l’a pourtant fait dans une furie meurtrière sans précédent ; sous prétexte que c’était des méchants nobles ou marchands, nous l’avons approuvée sans discernement (2).

Tyrion exhorte alors le faible Jon à choisir sa destinée, lui qui a toujours cherché à faire le bon choix, à protéger les gens. Lui seul peut désormais tuer le tyran qui s’annonce.

Et c’est bien Jon, qu’on présente comme un impuissant depuis cinq épisodes, qui va effectivement prendre ses responsabilités, car « l’amour est plus fort que la Raison », mais « le Devoir est la mort de l’Amour » (3).

Après avoir donné une ultime chance à Daenerys, l’abjurant de gouverner avec clémence, celle-ci refuse, avec la folie des dictateurs. Emilia Clarke apporte ici tout son talent et sa beauté juvénile, ce qui rend ses propos encore plus atroces. Hitler, en version jeune et blonde : « Je sais ce qui est bon ». Et ceux qui pensent autre chose ? « Ils n’ont pas le choix ! » (4) Sa mort est alors inévitable, dans une scène sublime d’ambiguïté.

Jon a rempli sa mission, il a tué le tyran qui est en nous, celui que nous appelons de nos vœux. Et il délivre au passage la deuxième leçon politique de Game of Thrones : ne choisissons pas nos leaders sur leur bonne tête, leur beauté physique, leur charisme, leur humour. Malgré l’amour que nous leur portons, réfléchissons… Elisons nos leaders avec notre tête.

Et c’est exactement ce que vont faire Benioff et Weiss à la quarantième minute.

L’épisode bascule à ce moment-là dans une scène assez artificielle : Tyrion, qui pense être condamné à mort, est présenté devant le conseil des grandes familles de Westeros. Il va alors servir d’arbitre au débat politique. Tyrion n’a pas le droit de parler, mais pourtant il va le faire avec éloquence. On lui demande, comme à Machiavel, comment gouverner ce tas de ruines que sont devenues les 7 Couronnes. Les chefs des plus puissantes maisons de Westeros, assises, s’opposent à Ver Gris, debout. Le chef des Immaculés, qui vient de perdre sa charismatique patronne, ne demande que justice, refuse tout compromis : un autre cycle de guerres se profile à l’horizon.

Ser Davos pose la première pierre : « Nous nous entretuons depuis longtemps ». Il propose une terre aux Immaculés ; il y a eu trop de morts, il faut trouver une autre issue. Suit alors un débat surréaliste pour trouver un roi. C’est la Grande Scène.

Première solution, prendre le plus âgé (Tully), vite remis à sa place par le vrai pouvoir (Sansa). La République, portée par Samwell Tarly ? Tout le monde rit de bon cœur (et le spectateur avec… On y reviendra…) Pourquoi ne pas faire voter les chevaux, pendant qu’on y est ! Sinon, il reste la compétence (Tyrion) ? Ça ne suffit pas non plus. Qui alors ?

Tandis qu’une musique élégiaque s’amorce, Tyrion Lannister suggère alors autre chose : le compromis, c’est à dire la base de la politique. Prenons le plus petit commun dénominateur : l’invalide, l’enfant, le faible, mais aussi le visionnaire : Bran. Et le fait acclamer par les Maisons de Westeros. Samwell avait donc raison ; on ne peut plus gouverner par simple héritage, sinon c’est une nouvelle guerre de succession. Si la démocratie est un choix un peu radical, commençons par une monarchie élective, hors des liens du sang. Car comme le dit Machiavel-Tyrion, « les fils de rois peuvent être très stupides. [Bran, qui ne peut engendrer] ne nous tourmentera donc pas. Désormais, les gouvernants ne naîtront pas, ils seront choisis (5) ». Et Tyrion d’asséner la troisième leçon de philosophie politique, tout autant destinée à Ver Gris qu’au spectateur : «  C’est cette roue-là que Daenerys voulait détruire… »

Une fois de plus, les auteurs s’adressent au spectateur. Pourquoi avons-nous ri à la suggestion de Samwell Tarly ? Après tout, nous vivons dans des démocraties. Mais nous sommes fascinés par ces histoires de rois et de reines, et de princes héritiers du trône : il suffit de voir la passion qui s’empare des médias à la naissance d’un rejeton de la famille royale d’Angleterre (6). Pour autant, ce n’est pas le mode de gouvernement que nous avons choisi. Nous nous sommes débarrassés, souvent violemment, de la royauté. Cette Grande Scène s’apparente en fait à une forme de retour sur terre imposée au public par les auteurs. Vous êtes fascinés par tout ça depuis que vous regardez Games of Thrones, Star Wars, ou n’importe quelle heroic fantasy), mais réfléchissez ; ces gens-là ne sont que des dictateurs, et vous n’en voudriez pour rien au monde.

La morale de l’histoire (une autre vie est possible)

Juger la fin du Trône de Fer sur le plan du réalisme est un contresens. La fin d’une série ne peut se comprendre que comme une grande métaphore finale. Le but n’est plus de fournir des réponses réalistes, mais bien de faire passer un message. Qu’avons-nous appris pendant huit ans ? La fin est donc logiquement la partie la plus intéressante de ce Season Finale, quand l’épisode s’attarde sur le sort des chouchous des fans : la famille Stark.

Godard disait que le cinéma est une affaire de morale, et il n’a jamais autant eu raison. Si Game of Thrones est réussi, c’est parce qu’il apporte une morale satisfaisante à son histoire. Et même si l’on ricane à chaque fois que l’on évoque ce sujet, c’est qu’on le confond souvent avec LA Morale. Mais le plaisir basique que l’on retire d’une œuvre de fiction, c’est bien celui-là. Si la morale est satisfaisante (même s’agissant d’anti-héros comme Tony Soprano ou Tony Montana), le film est réussi. Si la morale est dérangeante (Suicide Squad, Deadpool), pas claire (HHhH) ou simplement fumeuse (The Dark Knight Rises), on est choqués ou on reste sur sa faim.

Ici, le final moral est incarné par la famille Stark : chacun sa route, chacun son destin. Il y a d’autres façons de vivre que la vengeance, la guerre, ou la soif éternelle du pouvoir. On n’est pas forcés de plier le genou, même devant son propre frère, on peut affirmer son indépendance, comme Sansa, nouvelle reine d’Ecosse de Winterfell. On peut se désintéresser du pouvoir et partir à l’aventure, choisir l’exploration, le grand ouest, parce que le pouvoir n’est pas fait pour nous (Arya). Et on peut rester attaché à ses racines (le Nord) et, en pionnier, étendre l’humanité dans des contrées réputées inhospitalières, au-delà du Mur.

Ces trois possibilités sont magnifiques, car elles sont totalement incarnées par leurs personnages, et leurs acteurs. Arya n’a jamais couru qu’après l’aventure ; même si c’est une tueuse, elle ne cherche pas le pouvoir. Sansa a toujours voulu être une princesse, de manière ridiculement adolescente saison 1, et sérieusement maintenant, comme un gouvernant crédible.

Quant à Jon Snow, le personnage menaçait de devenir de plus en plus falot. Mais cela s’apparente maintenant à une ruse scénaristique signée Benioff/Weiss pour frapper encore plus fort dans ce final éclatant.

Jon Snow, victime des compromis Ver Gris/Bran, est condamné à retourner à la Garde de Nuit. Le voilà revenu au point de départ, mais en fait, c’est un nouveau départ. Car il part bientôt à la tête de sauvageons souriants, pour conquérir pacifiquement des territoires au-delà du Mur. Et s’enfonce, magnifiquement, dans la forêt des origines, tandis qu’une première fleur repousse : Winter is gone.

Le voilà porteur d’une morale encore plus importante: nous ne sommes pas destinés à quelque chose, nous sommes ce que nous choisissons de devenir. Jon Snow est un targaryen, donc héritier du trône, donc fou ? (7) Pas du tout : Jon Snow est avant tout le fils d’un père adoptif qui l’a bien éduqué : Ned Stark, le seul véritable héros de la série. Élevé par un père aimant et dans les bonnes valeurs, son éducation prime sur le sang. Ce n’est pas parce que je suis héritier du trône que je dois en hériter, ce n’est pas parce que ma famille est folle que je dois l’être, ce n’est pas parce que je suis targaryen que je ne suis pas un vrai nordique. Tout simplement parce que j’ai été éduqué ainsi, et que je choisis de le rester…

Ce n’est pas pour rien que le Trône de Fer plait à l’extérieur du petit cercle de fans de l’Heroic fantasy. Car il détruit le mythe du surhomme, de la destinée, pour y superposer la politique et la vie.

Brisons le quatrième mur (et la fascination que nous avons engendrée)

« I had nothing to do but think these past two weeks. About our bloody history.  About mistakes we’ve made. What unites people? Armies? Gold? Flags? Stories. There’s nothing more powerful in the world than a good story.»

Les séries qui se terminent le font tous : un grand flash-back qui réunit tous les personnages (8), dont nous sommes follement tombés amoureux (ou alors, que faisons-nous devant notre écran huit ans plus tard ?(9)).

Ces personnages, nous voulons les revoir une dernière fois. Il y a plusieurs façons de faire sa sortie, en la ratant façon Lost (finir comme on a dit qu’on ne finirait pas), ou façon Twin Peaks saison 3 (par une immense destruction de tout ce qui a précédé). On peut aussi finir brillamment (Le Twin Peaks première manière avec une fin en forme de boucle, ou Friday Night lights, dont le final moral et choral ressemble beaucoup à celui de GoT).

On peut aussi ramener tout le cast (Six Feet Under, The Wire), et les mettre en prison pour l’ensemble de leurs œuvres (Seinfeld). Les séries les plus malines s’en tirent souvent par une pirouette (Mad Men, Les Sopranos).

Mais toutes les grandes séries passent par le scandale, et la déception. Et il est normal qu’une grande fascination engendre une toute aussi grande frustration. Car chacun, en réalité, veut sa fin. Les désirs des spectateurs sont par définition multiples ; ils entrent en conflit avec la fin, forcément unique, choisie par le scénariste.

Dans Game of Thrones, le Professore Ludovico en pinçait pour Cersei. Et l’ombre de Machiavel esquissait une belle fin pour la plus belle des MILF de Westeros : pendant que les idiots se battaient contre le Prince de la Nuit, la flamboyante rousse ramassait les morceaux, à l’instar des américains laissant les russes défaire les nazis. Mais le Professore n’est pas scénariste de Game of Thrones, pas plus que ceux qui souhaitaient  que Jon et Daenerys se marient et aient plein de petits targaryens régnant en paix sur le monde.

C’est ce message qui est adressé au spectateur, dans la Grande Scène des Arènes. Un aparté théâtral de Tyrion destiné en apparence aux familles de Westeros mais en réalité au public : « J’ai bien réfléchi dernièrement » Vous aussi, le public ? Vous en avez élaboré des fins pour GoT, non ? « Mais qu’est-ce qui unit vraiment les gens ? Les histoires ; il n’y a rien de plus puissant qu’une bonne histoire… »

Tu dois comprendre, ami spectateur, que tu n’es qu’un spectateur ; on ne peut pas faire plaisir à tout le monde, on ne peut pas te donner la fin que tu souhaites. Réveille-toi ! Tu ne nous as pas suivis jusque-là pour entendre ce genre de fadaises ??? Il faut que nous, les auteurs, nous finissions cette histoire, pour vous unir une dernière fois.

Alors oui, nous avons « commis des erreurs, connu des mariages, des guerres, des naissances », nous avons eu « nos triomphes, et nos défaites » mais tu dois accepter cette fin : Bran sera le dépositaire de cette histoire, car tu n’as pas d’autre choix, petit spectateur. (10) Tu peux faire tes pétitions en ligne, rugir sur les réseaux sociaux, mais l’artiste, c’est nous, et personne d’autre. Même pas George Martin, dont tu aurais tout autant critiqué la fin de Game of Thrones qui lui reste à écrire…

Tais-toi. Arrête de tout vouloir contrôler. Regarde. Ressens. Et pleure…

(1) Ce n’est pas pour rien qu’à l’épisode précédent (S08e05), Twingodex, jeune philosophe de 17 ans, nous faisait remarquer que Daenerys et son dragon-B.52 ne faisaient qu’appliquer le programme du Prince, chapitre 2 « Comment on doit gouverner les Cités ou Etats qui avant d’être occupés vivaient sous leur propres lois ? » Réponse machiavélienne : « En vérité il n’y a pas d’autre façon sûre de les posséder que de les détruire. Et qui devient seigneur d’une cité habituée à vivre libre, et ne la détruit pas, doit s’attendre à être détruit par elle » (2) « When she murdered the slavers of Astapor, I’m sure no-one but the slavers complained; after all, they were evil men. When she crucified hundreds of Meereenese nobles, who could argue they were evil men? The Dothraki khals she burned alive, they would have done worse to her. Everywhere she goes, evil men die and we cheer her for it. » (3) Tyrion : “Love is more powerful than reason” Jon Snow: « Love is the death of duty. And sometimes, duty is the death of love »(4) Daenerys Targaryen: Because I know what is good. And so do you. Jon Snow: I don’t! Daenerys Targaryen: You do! You do, you’ve always known! Jon Snow: What about everyone else? All the other people who think they know what’s good? Daenerys Targaryen: They don’t get to choose. Be with me. Build the new world with me! This is our reason! It has been from the beginning, since you were a little boy with a bastard’s name and I was a little girl who couldn’t count to twenty! We do it together! We break the wheel…together. (5) « Sons of kings can be stupid as you well know. [Bran] will never torment us. That is the wheel your queen wanted to break. From now on, rulers will not be born, they will be chosen. On this spot, by the lords and ladies of Westeros, to serve the realm. » (6) Comme le faisait remarquer quelqu’un, il n’y a pas de raison de se passionner pour Archie, le jeune fils de Meghan et Harry ; il n’a aucune chance d’atteindre la couronne d’Angleterre. Ou alors, ce serait bien pire que Game of Thrones. Ça voudrait dire qu’il aurait tué son père, sa mère, son oncle, sa tante  et son cousin, sans parler de ses grands-parents… (7) « You think our House words are stamped on our bodies when we’re born and that’s who we are?! Then I’d be fire and blood too! She’s not her father, no more than you’re Tywin Lannister! » (8) D’autres scènes sont là pour faire ce passage (Tyrion raconte toutes les horreurs auxquelles il a participé, Brienne écrit une notice flatteuse de Jaime, Samwell termine A Song of Ice and Fire, le nouveau Conseil réunit les anciens personnages, etc.) (9) « Why do you think I came all this way? » (10) « [Bran] is our memory, the keeper of all our stories: wars. weddings. births. massacres. famines. Our triumphs. Our defeats. Our past. »

Le lai de Khadar Khalizad

Il y a une corde rare, chez le rôliste, celle du poète. Hadden, (joué par Laurent), est de ceux là… Coincé depuis quelques jours dans les profondeurs de Khadar Khalizad, la cité naine abandonnée de La Campagne Impériale de Warhammer lui a composé ce sonnet :

 

Il est une cité, ancienne et souterraine,
Creusée sous la montagne, au cœur noir d’un volcan.
Forteresse perdue depuis plus de mille ans,
Abandonnée des nains ayant fui leur domaine.

Car le roi khazalide, en ces profondeurs naines,
Et son ami Sigmar, et ses guerriers vaillants
Sont descendus combattre un danger menaçant
Et tous ont disparu pour une mort certaine.

Depuis ce sacrifice au destin si fragile,
Le peuple khazalide est toujours en exil,
Honteux et malheureux de porter ce fardeau.

Le royaume des nains, oublié sous les cieux,
N’est plus qu’un long dédale, obscur et silencieux,
Mais demeure un secret en ce vaste tombeau.

Aux grands remèdes, les grandes responsabilités !

Laura, Melinda, Alexander, Rick, et Jeremy perdus dans l’enfer du Kansas

Même les rôlistes débutants font de grands dialoguistes. Ainsi Sacha, 17 ans, aka Jeremy Schneider, scientifique à la NASA et dragueur de cabine d’essayage, a sorti le meilleur de lui-même dans la partie de The Return of the Not Totally Dead. En pleine apocalypse zombie au cœur du Kansas, perdu avec Melinda la Pom Pom Girl* dans le collège de Lawrence, poursuivi par une horde d’infectes sortis tout droit de Friday Night Lights, (« Go, Lawrence Cows, Go ! »), voilà que Jeremy a une idée : lancer les tables de classe du deuxième étage pour les empiler tel un Tetris géant pour s’échapper de cet enfer.

Aux autres joueurs, Alexander Cornelius, le prêtre catholique (Emmanuel), Rick Bradley, le Shérif (Maxime) et Lara Smith, l’ado gothique punk (Robin), soit 6 sourcils levés, doutant probablement de la faisabilité technique de cette opération, Sacha jeta, les yeux clairs et le cœur plein, la réplique définitive :

– « Aux grands remèdes, les grandes responsabilités ! »

 

* Oui, bon on ne joue pas à Pendragon, non plus !

« 20+1= 21, mais 20-1 ? »

Skrit, étude au crayon, Coll. privée, Altdorf

Les rôlistes sont toujours d’élégants dialoguistes, parce notre passion est avant tout l’art de la parole. Depuis les Braunstein de David A. Wisely, les Blackmoor de Dave Arneson qui mèneront au Donjons & Dragons de Gary Gygax, c’est dans la parole (pour décrire les actions, mais progressivement, pour gérer les interactions sociales) que se situeront l’art – et le plaisir – du jeu de rôle.

Certains sont dialoguistes par hasard (cf. post précédent) d’autres le sont par talent. C’est le cas de Conrad, notre nautonier national dans Warhammer (et par ailleurs MJ de Cirande), déjà auteur de quelques phrases cultes sur ce blog.

Cette fois-ci, on est dans les profondeurs de Khadar Khalizad, l’ancienne cité naine où résident d’anciennes créatures du Chaos.

Le Chaos, comme chacun sait, est imprévisible, et l’on peut retrouver l’un de ses séides (un skaven) prisonnier d’un autre (une tribu gobeline).

Après l’avoir débarrassé de ses tortionnaires, vient l’heure de l’interrogatoire. Première surprise, ces skavens sont intelligents*. Deuxième surprise, malgré ses nombreuses blessures, Skrit a gardé le goût du sarcasme.

Comme chacun le sait, les PNJ sarcastiques ont deux effets sur le joueur de JDR. Soit c’est le Grand-Méchant-Qui-Vous –Torture-Dans-Les-Souterrains-De-Son-Château, et il ne perd rien pour attendre, soit c’est une Créature-Faible-Que-Vous-Tenez-A-Votre Merci, et elle ne perd rien pour attendre.

Voilà donc que le skaven s’amuse à balader Conrad sur le nombre de ses congénères présents dans les entrailles de la cité naine :

– « 100 ? 50 ? 40 ? …»

Après une bonne baffe d’Helmut (qui possède, rappelons-le, l’Atout Gladiateur des Tripots), Skrit redevient plus sage :

– « Nous sommes 20. »

C’est alors que Conrad s’approche de la créature, et lui pose une devinette (à la grande incompréhension des autres joueurs, attendant de voir où cela mène) :

– « Tu sais sans doute combien font 19 skavens plus 1 ? »

– « Euh… oui… 20 » répond Skrit, surpris.

– « Mais sais-tu combien font 20 skavens moins 1 ? »

Skrit le regarde sans comprendre.

– « 19 ? »

– « En effet ! 19. »

Et, immédiatement, il le transperce de son épée.

« Encore faut-il que la pharmacienne puisse accéder au bordel sans problème… »

« Du linge propre et de l’eau chaude ! »

Parfois, le jeu de rôle sonne comme un porno des années 70. Et on a beau être au milieu du plus classique des westerns, l’excellente Nuit des Chasseurs de Mister Yno.

Ainsi, quand Larry Olsen, le marshall se fait rétamer par le Tueur de l’Apocalypse d’un méchant coup de dague, il trouve refuge chez la douce Ginny, jeune veuve (et pharmacienne) dont le mari vient de tomber, lui aussi, sous les coups du tueur. Du linge propre et de l’eau chaude, on est en pleine Petite Maison dans la Prairie.

Mais comme ça dragouille sec à Desolation (et que la petite ville texane ne manque pas de veuves dans le besoin), les mots fourchent…

 

Madam’ Betsy Foster

 

Ainsi, quand la jeune pharmacienne entreprend de soigner Elmer Fletcher, l’autre blessé – qui, lui, a des vues sur Betsy Foster, la tenancière de la maison Cletus – ça donne des dialogues cocasses :

– « Encore faut-il que la pharmacienne puisse accéder au bordel sans problème… »

Un ange passe… Ou plutôt, le fantôme de Brigitte Lahaie…

 

brigitte lahaie.jpeg

PS. C’est peut-être parce qu’avant, le même joueur parlait de maladie vénérienne, (SPOILER : un indice capital dans l’intrigue) : « Le pharmacien lui avait fourni la syphilis pour soigner le mercure »

Derrière la porte ? La magie du jeu de rôle !

L’autre jour j’ai masterisé une partie chez une amie, et sa mère était là. C’est toujours un peu gênant de jouer devant des gens qu’on ne connait pas, a fortiori qui ne connaissent rien au jeu de rôles. Quelles blagues peut-on faire ? Doit-on expliquer qu’on a tranché la tête de l’orc « pour de faux » ?  Que ces rituels sataniques sont « le canon esthétique d’une bonne partie de Cthulhu » ?

Mais de fait, on a vite oublié sa présence. La maman était très discrète, assise dans un coin, probablement en train de lire un livre… Les joueurs ont investi l’institut Brompton, ont commencé à fouiller un peu partout, mais ont bloqué sur une porte blindée. Il était tard, on s’est arrêtés là…

Il y a quelques jours, nouvelle partie, j’ai revu cette amie et on a reparlé de la partie. Sa mère était  rentrée en Normandie. Mais avant de partir, elle avait demandé à sa fille :

 – J’aimerais quand même bien savoir ce qu’il y a derrière cette porte…

Magie du jeu de rôle.

Champagne !

La nuit promet d’être belle
Car voici qu’au fond du ciel
Apparaît la lune rousse
Saisi d’une sainte frousse
Tout le commun des mortels
Croit voir le diable à ses trousses
Valets volages et vulgaires
Ouvrez mon sarcophage
Et vous pages pervers
Courrez au cimetière
Prévenez de ma part
Mes amis nécrophages
Que ce soir nous sommes attendus dans les marécages
Voici mon message
Cauchemars, fantômes et squelettes
Laissez flotter vos idées noires
Près de la mare aux oubliettes
Tenue du suaire obligatoire
Lutins, lucioles, feux-follets,
Elfes, faunes et farfadets
S’effraient d’mes grands carnassiers
Une muse un peu dodue
Me dit d’un air entendu
Vous auriez pu vous raser
Comme je lui fais remarquer
Deux, trois pendus attablés
Qui sont venus sans cravate
Elle me lance un ?il hagard
Et vomit sans crier gare
Quelques vipères écarlates
Vampires éblouis
Par de lubriques vestales
Egéries insatiables
Chevauchant des Walkyries
Infernales appétits de frénésies bacchanales
Qui charment nos âmes envahies par la mélancolie
Envoi !
Satyres joufflus, boucs émissaires
Gargouilles émues, fières gorgones
Laissez ma couronne aux sorcières
Et mes chimères à la licorne
Soudain les arbres frissonnent
Car Lucifer en personne
Fait une courte apparition
L’air tellement accablé
Qu’on lui donnerait volontiers
Le bon Dieu sans confession
S’il ne laissait malicieux
Courir le bout de sa queue
Devant ses yeux maléfiques
Et ne se dressait d’un bond
Dans un concert de jurons
Disant d’un ton pathétique
Que les damnés obscènes cyniques et corrompus
Fassent griefs de leur peine à ceux qu’ils ont élus
Car devant tant de problèmes
Et de malentendus
Les dieux et les diables en sont venus à douter d’eux-mêmes
Dédain suprême
Mais déjà le ciel blanchit
Esprits je vous remercie
De m’avoir si bien reçu
Cocher lugubre et bossu, déposez-moi au manoir
Et lâchez le crucifix
Décrochez-moi ces gousses d’ail
Qui déshonorent mon portail
Et me chercher sans retard
L’ami qui soigne et guérit
La folie qui m’accompagne
Et jamais ne m’a trahi
Champagne !

Election du Prince Electeur

Amphore antique, collection Wolfram von Liebewitz

Au deuxième tour de l’élection du Prince Electeur de Bretonnie, d’aucuns crurent bon de ne pas vouloir départager le camp d’Ulric de celui de Sigmar, arguant du fait qu’ils ne voulaient pas choisir entre la peste noire et la suette.

Nicollo Machiavelli, qui « n’aime rien et ne prise autant que les actions des grands hommes », cita alors l’Ancien Thucydide, qui, dans sa Guerre du Péloponnèse, au Ve siècle A.S., écrivait ceci :

« Il y a une certaine conception de l’honneur, qui, dans les situations humiliantes et devant les périls manifestés, inspire les réactions les plus désastreuses. »